No ratings.
Du ressentiment à l'attentat |
Les draps étaient encore tièdes de nos sueurs, et la dague de son sang, lorsque je franchis la porte de la ville au galop. Comme tant d’autres il m’avait séduite, comme tant d’autres, il m’avait possédé et comme tant d’autres, il m’avait rapporté assez pour vivre au moins une bonne semaine sans problèmes. Puis je devrais trouver un nouveau client. Si possible jaloux, et moyennement riche, ce sont les meilleurs, car, s’ils en sont arrivés là, mettant une part de leur vie, et de leur fortune dans la balance, c’est qu’ils sont prêts à tout. Les femmes surtout… Il faudra aussi que je retourne le voir, Lui. Le frisson qui me parcourt me fait presque lâcher ma cape. Pas demain. Je serais en train de chercher mon client. Je ne parle pas de celui qui m’a payé pour ce soir, mais d’un nouveau. Car ils payent toujours avant, ça évite les ennuis d’impayés, les parlotes, les jérémiades, les embuscades. Je les trouve grâce à ce petit objet. Il les sent, ces gens qui seront mes clients. Alors je les suis, je cherche qui les rend fou. Puis je les aborde, je leur demande s’ils connaissent cette personne, je confirme leurs pires craintes, j’attise leur colère. C’est sur ce seul mot que se joue la vie d’un homme pour moi : « Combien ? » D’abord l’incompréhension, puis le hoquet offusqué, puis le refus, puis la confusion… L’ordre peut changer, mais il aboutit inéluctablement à la réponse que j’attends. Ils n’ont aucune raison de me faire confiance. Mais je repars la bourse pleine, et eux le regard vide, se demandant encore comment ils en sont arrivés là, avec pour seul certitude celle qu’ils n’entendront plus jamais parler ni de moi, ni de leur tourmenteur… |